Accompagnée par
Louise Drouin

Ce matin nous nous réveillons au son de la voix du capitaine qui nous annonce l’entrée dans le canal Martinez qui sera une belle navigation.  Il a raison!  Nous ouvrons les rideaux pour admirer les beaux paysages chiliens.  Nous avons une belle cafetière Nespresso dans nos cabines respectives et l’on prend donc le temps de se faire un petit café tout en admirant sur notre balcon les paysages qui défilent lentement.  Quelle belle croisière et surtout quelle belle navigation!

Notre capitaine a tenté de s’approcher du glacier Jorge Montt mais a dû rebrousser chemin à cause de la profondeur de l’eau à certains endroits.  Une belle tentative mais il faut rester prudents et, pour Ponant, c’est la sécurité avant le reste.  Nous allons par la suite prendre le petit-déjeuner et discuter entre amis voyageurs.  J’en profite toujours pour prendre des photos de mes voyageurs durant mes voyages.

Nous arrivons donc après le dîner pour notre première escale de notre périple : le village isolé de Tortel, suspendu au-dessus de l’eau, et ses emblématiques passerelles de bois faisant office de ruelles.  Caleta Tortel est un tout petit village, isolé au fond du Golf des Peines, coincé entre deux champs de glace du Nord au Sud, à l’embouchure d’un des plus beaux fleuves du Chili, le Fleuve Baker « Río Baker ».

Village de pêcheurs pittoresque et coloré, l’escale de Tortel jouit d’une situation privilégiée au cœur de la Patagonie australe, à mi-chemin entre Puerto Montt et le cap Horn.  Nous avons apprécié le panorama grandiose qui s’offrait à nous depuis le devant du navire lors de l’arrivée au fond de ce fjord, montagnes arrondies, forêts denses, eaux claires du Pacifique… Nous étions tous prêts pour aller marcher ou faire une promenade le long des nombreux pontons de bois suspendu à quelques mètres de l’eau, afin d’admirer ce décor.  Le village est parsemé de sculptures d’artistes locaux qui sont une excellente entrée en matière pour rencontrer cette communauté aussi attachante que soudée.  Tortel est une commune du Chili faisant partie de la province de Capitán Prat, elle-même rattachée à la région Aisén.  En 2002, sa population s'élevait à 507 habitants.  Et aujourd’hui, peu de gens se trouvaient dehors, presque un village fantôme.  L’année dernière à mon passage un dimanche matin personne n’était dehors...probablement tous au lit!

Je désire vous parler un peu de géographie et un peu d’histoire de cette région, le territoire de Tortel s'étend vers l'ouest jusqu'à la côte Pacifique.  Il comprend un grand nombre d'îles, dont l'île Maldonado. Il est traversé par le plus grand fleuve chilien le rio Baker ainsi que d'autre cours d'eau importants : Río Pascua, Rio Bravo.  Le terrain est fortement accidenté et découpé par des estuaires, des bras de mer (comme le Canal Messier) et est recouvert au nord et au sud par des champs de glace dont la superficie atteint 4 000 km2.  Le Parc national Laguna San Rafael, le Parc national Bernardo O'Higgins et la Réserve nationale Katalalixar occupent plus de la moitié de la surface.  Tortel se trouve à 1 616 kilomètres à vol d'oiseau au sud de la capitale Santiago et à 272 kilomètres à vol d'oiseau au sud de Coyhaique capitale de la région Aisén.

Jusqu'au XIXe siècle la région n'est cartographiée que de manière très grossière et est inhabitée. Au début du XXe siècle, le gouvernement chilien tente de lancer un mouvement de colonisation de la Patagonie. En 1901 une concession est accordée à la Compañía Explotadora del Baker, spécialisée dans l'élevage, à condition que celle-ci installent 1000 familles de colons entre les latitudes 42° et 52°. La société construit les premières installations de la région à Puerto Bajo Pisagua sur la rive nord de l'embouchure du rio Baker ainsi qu'une scierie et un quai dans ce qui deviendra par la suite le village de Caleta Tortel. En 1906 56 travailleurs de l'île de Chiloé meurent de faim et de scorbut et la société fait faillite peu après. D'autres concessions sont accordées par la suite mais seuls quelques colons s'installent dans la région.  La Marine militaire chilienne installe un poste de radio-télégraphie et une infirmerie.  Une première maison avec jetée en bois apparait à cette époque.  La petite agglomération grandit lentement et en 190 la commune de Tortel est créée.  Tortel fait référence à Jean Tortel, un marin français, qui a joué un rôle important durant la guerre d'indépendance du Chili.  Une école est construite en 1970 à Caleta Tortel avec l'assistance de la Marine.  La population dépasse les 200 habitants en 1970 et atteint pratiquement 300 habitants 10 ans plus tard.  Près de 80 % du territoire de la commune est intégré dans des parcs naturels dans les années 1980. En 2003 Caleta Torrel est relié au reste du Chili par voie routière grâce à l'extension de la Carretera Austral. L'absence d'accès et des ressources naturelles peu abondantes ont freiné jusqu'à présent l'occupation de la commune.  La tentative d'implantation de colons au début du XXe siècle s'est soldée par un échec.  Depuis les années 1950 la population très faible recommence à progresser.  Depuis 2003 l'agglomération principale Caleta Tortel est reliée au reste du Chili par un embranchement de la Carretera Austral.  En 2012, la population de la commune s'élevait à 531 habitants. La superficie de la commune est de 19 711 km2 (densité de 0,03 hab./km²)1.

Le climat de Tortel est de type océanique avec influence méditerranéenne caractérisé par une température estivale fraiche une température hivernale fraiche mais toujours supérieure à 0 °C et des précipitations étalées tout au long de l'année. Sur l'île San Pedro située à l'entrée du golfe donnant accès à Caleta Tortel la température annuelle moyenne est de 8,3 °C et les précipitations annuelles très élevées atteignent 3 556 mm.

Il n’y a pas si longtemps encore, on y accédait uniquement par la mer.  Aujourd’hui, quelques kilomètres de piste depuis la route australe permettent de s’y rendre.  Les rares personnes à s’y aventurer sont les voyageurs qui se déplacent encore plus au Sud, au point final de la route australe : à Villa O’higgins, un village unique au monde, au milieu de paysages d’une triste beauté, dont les 507 habitants (au moment où j’écris ces lignes) vivent de la coupe et de la vente de bois de cyprès.

Ici pas de pêcheurs.  Ce village à la particularité de n’avoir aucune rue ni aucun chemin : on le traverse uniquement grâce à des passerelles disposées sur plus de 8 km et où il fait bon flâner et se promener.  Lieu hors du temps, on y rencontre très peu de touristes ; l’hospitalité de ses habitants vous séduira.  Y passer quelques journées est une expérience unique, totalement différente de tout ce que vous avez pu connaître auparavant.

Chacun revient après avoir fait sa marche santé, quelques-uns de plusieurs heures car notre navire passait 4 heures en mouillage afin de donner la chance de profiter de ce coin du Chili surtout avec une superbe température et le soleil.  Les photos sont magnifiques avec cette belle journée.  Les fleurs sont particulières et ce matin, sur le navire, les naturalistes nous expliquent plein de détails importants sur la faune, la flore et tout le reste.  Ces rencontres que l’on appelle « recap » sont vraiment diversifiées et intéressantes et touchent tous les sujets passés ou à venir.  Nous apprenons plein de choses instructives en plus de ce que nous vivons comme expérience.

La journée passe toujours bien vite, déjà le temps de se retrouver au grand salon pour notre apéro musical.  Oui, je le répète la vie est bien belle!  Un autre excellent souper et quelques pas de danse avant de se rendre à notre lit pour une autre belle nuit tranquille.

Louise